Les systèmes de Baucher sont cohérents de par eux-mêmes, spécialement quand on lit leurs formes ultimes et plus modérées, mieux expliquées par ses meilleurs élèves Raabe et Faverot. On peut les modifier, les étendre ou les réduire (Baucher lui-même a fait ca), mais on ne peut pas choisir un concept de Baucher sans aussi appliquer son opposé sur lequel Baucher a insisté. Il faut bien comprendre qu'ils sont basés sur la dualité des extrêmes, "la Coincidence des Opposés" de Nicholas de Cusa, comme me l'a rappellé Carlos Pereira. En termes plus simples, il faut enseigner au cheval toutes les leçons inverses a la précédente. En avant implique en arrière, mobilité implique immobilité, rectitude implique pli, l’élévation de l’encolure implique son abaissement, son enroulement implique son déroulement, etc.
S’il y a « attaques » (un mot malheureux de Baucher qui serait mieux exprime et remplace par « battements » et « vibrations »), et descentes de jambes (cessation des aides quand le cheval avance de lui-même), il faut que le cheval connaisse aussi l'effet d'ensemble pour cesser ce mouvement.
Chaque aide doit servir dans les deux sens : l’assiette pousse le cheval et l’arrête, la main restreint le mouvement en avant et l’autorise. Partant de la, il en est de même pour les jambes : le cheval doit savoir que les jambes peuvent le faire avancer et le faire s’arrêter ou se cadencer. Cela évite les confusions et les incompréhensions (volontaires ou involontaires) de la part du cheval. Si le cheval ne sait qu’aller de l’avant sur les jambes, il faut a chaque fois utiliser la main pour ralentir le cheval, ce qui le comprime et le raccourcit sans forcement le rassembler. Ca peut marcher sur des chevaux « simples », c’est-a-dire assez rigides pour toujours rester d’une pièce sans se comprimer dans les transitions, ou pour l’équitation simple (le « main sans jambes et jambes sans main » de l’équitation utilitaire). Pour le dressage de plus haut niveau, impliquant le rassembler et l’élévation des allures d’école dans un ramener constant et sans encapuchonnement, ainsi que des chevaux ardents et flexibles (comme Undercover), la garantie de succès est impossible sans effet d’ensemble.
En fait, l’effet de rassemblement et de ralentissement des jambes est beaucoup plus naturel et efficace que leur effet propulsif (qui doit être développé, encouragé et vérifié en permanence).
Il faut sortir des clichés du répertoire équestre limité du dressage moderne pour savoir que l’on ne peut pas dresser tous les chevaux a tous les mouvements dans toutes les circonstances sans connaitre et pratiquer une orme ou une autre de l’effet d’ensemble. Oliveira disait aussi la même chose aux puristes qui refusaient l’usage des rênes coulissantes. Il n’y a pas de dressage efficace sans l’usage de tous les procédés inventés jusqu'à aujourd’hui par les visionnaires du dressage qui ont su tirer des principes de valeur de leur longue pratique .
J'ai travaille 10 yearlings de pur sang la semaine dernière et j'ai enseigné une quinzaine de grooms mexicains (très peu éduqués) a appliquer « l'effet d'ensemble par la cravache » de Raabe. Ces poulains, très bien nés, très bien nourris et d’une grande énergie, sont dangereux sans un dressage pratique. D’autre part, ces poulains doivent apprendre a marcher avec une grande amplitude, rectitude et calme, et s’arrêter carré, l’encolure basse, pour réaliser leur potentiel financier aux ventes de Keeneland, Tattersall et Deauville auxquels ils sont destinés.
Voila donc les raisons pour lesquelles cet élevage qui compte 750 chevaux, 240 poulinières, 149 yearlings, 250 chevaux a l’entrainement qui ont gagné 1250 courses l’année dernière, m’a engagé pour améliorer l’habileté des grooms et le dressage des poulains.
Je leur ai donc donne le système le plus simple possible afin de changer tout ca en une semaine. Au prix que je leur coute, il faut du rendement . Tout ce dont j’avais besoin pour y arriver se trouve entre Baucher et l’Endotapping.
1. Lever la tète pour obtenir l'arrêt et le reculer par un tapotement sous le menton avec l'Endostick. L’élévation de l’encolure, telle que Boisguilbert l’explique (petit livre a 12 euros de chez notre ami Bruno de la Bonnelière), réduit toutes les résistances en surchargeant le garrot et les postérieurs pour un bref instant. La défense naturelle du poulain est de pousser vers l’avant pour forcer le passage. L’arrêt et le reculer sont donc la solution évidente a ce problème.
2. Diminution immédiate de cette aide jusqu'a une simple élévation de la main précédée d'une aide verbale. Cette diminution est la récompense immédiate pour le bon comportement et l’opportunité pour le cheval de comprendre ce qu’on lui veut. De la vient le calme et la confiance.
3. Ajouter la pression de la cravache a la demande d'arrêt sur la poitrine, puis le devant des antérieurs, puis leur arrière, puis le dos, puis le flanc, puis le haut de la croupe. De fait, le cheval apprend que la pression du stick n'importe ou sur le corps entraine :
a: ou le calme/cadence dans le maintien de l'allure que la main autorise.
b: ou l'arrêt quand la voix et la main le demande.
Les poulains les plus calmes ont besoin d’être pousses par un tapotement dans le rythme de l’allure. Les plus ardents ont besoin d’être cadencés et calmés par une pression continue durant le travail au pas.
4. Une fois que tout le monde marche calmement, s’arrête droit et reste immobile, il est temps d’apprendre a allonger le pas. Des tapotements rythmés, synchronisés avec la foulée de chaque membre, reprogramme la gestuelle du cheval et lui apprend a s’étendre au maximum dans la symétrie.
Tous les poulains et tous les grooms ont compris ca en trois leçons. Ca n'a rien de difficile. On fait ca en selle plus tard comme expliqué dans un post précédent.
Évidemment, pour corriger un cheval comme Undercover qui a un lourd bagage émotionnel, on doit ajouter l'effet de relaxation (tapotements rapides) afin que le cheval apprenne a respirer profondément au lieu de s'énerver.
Toutes les formes de contact du stick (caresse, vibrations, tapotements, frappe plus ou moins forte, pression, glissement, frappe puis pression, etc.) créent des réponses naturelles qui deviennent progressivement des codes établis. Éventuellement, ces actions deviennent la base de la confiance (du cheval) par une prédictibilité (des actions du dresseur) qui implique une anticipation patiente (du cheval), toujours vérifiée.
Les Hollandais ont supprimé l'arrêt a l'entrée dans tous les tests nationaux parce qu'ils « déséquilibrent les chevaux », mais en fait parce que les chevaux ont perdu calme et immobilité par manque d'un dressage efficace, plus préoccupé par l'athlétisme des allures que par la correction du travail. C'est la pire idée possible concernant la qualité actuelle et future du dressage. Chaque fois qu’une culture équestre perd un savoir faire particulier (ou refuse de l'acquérir), on supprime le mouvement problématique. C’est le nivellement par le bas. Too bad, so sad….
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