Équitation Passion : Le site de l'Équitation à Cheval et à Poney.

 

François BAUCHER 1796 - 1873

Un siècle et demi plus tard, l'art équestre est retombé en l'état où le trouvèrent quelques Napolitains trois siècles plus tôt.

Alors qu'en 1833 devaient encore exister des témoins de l'âge d'or, les milieux équestres français s'enthousiasmèrent pour celui qui a écrit que, jusqu'alors la science équestre n'existait pas et qu'elle était à créer...

François BAUCHER

 

François BAUCHER formula la base de sa méthode en 1842 : "Il faut détruire les forces instinctives et les remplacer par des forces transmises." Il entendait par là la destruction chez le cheval de la possibilité de résister en pratiquant sur lui des assouplissements partiels, des flexions isolées de toutes les parties du corps, en place et à pied, puis à cheval. Nous pouvons différencier deux époques dans l'œuvre de Baucher, que nous distinguerons en deux manières.

Première manière

Une fois l'animal "décomposé", Baucher arrivait, à l'aide de "temps de mains" et de vibrations, jointes à l'enserrement du cheval par les jambes, aux attaques de l'éperon, de la cravache, à imposer un équilibre artificiel où le cavalier "ne portait rien dans les mains mais portait le cheval dans les jambes" (général L'HOTTE). Le rassembler était l'aboutissement du préparer : "Le cheval assoupli, placé, léger et supportant les attaques, concentré à l'aide d'effets d'ensemble prolongés, toutes les forces de l'animal entre les jambes du cavalier, qui, dès lors, ayant toutes les forces transmises à sa disposition, en réglait le jeu à son gré."

Utilisées par Baucher et son génie, ces formules quasi mécaniques firent son immense réputation. L'Europe entière commentait sa méthode et connaissait ses chevaux. En 1842, eut lieu une tentative d'expérimentation de la méthode dans l'armée. Pour des raisons autant politiques que techniques, ce fut un demi-échec. Il n'y eut pas de suite officielle, malgré l'intérêt qu'elle souleva chez de nombreux officiers de cavalerie.

La plupart des élèves de Baucher - et ils étaient nombreux - obtinrent des résultats très inégaux. Ceux qui connurent une certaine renommée, qui devinrent même des écuyers réputés, firent preuve d'un sérieux déviationnisme.

 

 

François BAUCHER

Seconde manière

Après l'accident de 1855 qui le priva d'une partie de ses moyens, Baucher mit au point une seconde manière. Objectifs et principes sont les mêmes, les moyens évoluèrent vers une plus grande délicatesse et un usage plus réduit de la force du cavalier : élévation de l'encolure par soutien des poignets qui, en décontractant la mâchoire, provoque, au même titre que le ramener, un transport du poids vers l'arrière; main sans jambe et jambe sans main; appui progressif des jambes et des éperons; décomposition de la force et du mouvement (s'arrêter et décontracter à chaque résistance); recherche de la légèreté aux jambes comme à la main ; suppression des éperons à cinq pointes; utilisation du mors de filet ; rétablissement de la légèreté par les "demi-arrêts" et les vibrations.

 

L'inspiration de sa seconde manière semble être venue à Baucher le jour où il déclara : "Voyez le cheval courant dans la prairie. Quelle souplesse et quelle légèreté dans les mouvements !" Jamais le Maître ne fut aussi prés de la vérité : retrouver l'équilibre du cheval libre. On ne peut affirmer qu'il l'atteignit, puisque, après son accident, il cessa de présenter ses chevaux en public. En dehors de l'enthousiasme que Baucher exprima lui-même sur ses résultats, on ne possède que les témoignages de ses plus fidèles disciples : le général Faverot de Kerbrech et le général L'Hotte.

Il faut d'ailleurs reconnaître que si ses moyens eux-mêmes marquent un énorme progrès sur la première manière, ils ne permettent pas tous, semble-t-il, d'atteindre l'objectif fixé. On n'en est plus à opposer constamment les mains aux jambes pour créer par contrainte un équilibre artificiel. On reste loin de la conception rêvée : l'équilibre du cheval par lui-même, sous un cavalier dont la préoccupation est de n'intervenir et de se faire sentir qu'avec la plus grande discrétion.

 

La nouveauté du Bauchérisme, sa précision didactique d'apparence scientifique étaient faites pour séduire la pensée du XIXème siècle. C'est par l'application d'aides parfois violentes, mais adroites, que Baucher obtenait les attitudes demandées. Les "bauchérisations" appliquées par l'auteur étaient de véritables prises auxquelles les chevaux devaient céder. Mais, que devient l'incurvation harmonieuse de l'ensemble qui assouplit et amène le cheval à s'équilibrer de lui-même?

 

François BAUCHER

 

Il ne reste du Bauchérisme que quelques principes valables qui sont : la mise progressive à l'éperon; l'absence d'opposition de jambes et de mains; les flexions à pied sur les chevaux contractés; les balancés de la main qui redressent l'avant-main.

 

Le dernier enseignement de F. Baucher

Extrait de "Un officier de cavalerie" du général L'Hotte

Vous pourrez télécharger ce livre à la fin de cet article ainsi que "Questions équestres", du même auteur.

Le général L'Hotte

Alexis L'Hotte (1825-1904) Écuyer en chef du Cadre Noir de Saumur, L'Hotte fut l'élève préféré de Baucher. Il a défini les buts à poursuivre par le cavalier en les résumant dans la célèbre formule : "Calme, en avant et droit".

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Nous sommes en 1873. Baucher, malade, est mourant. Le général L'Hotte rend visite à son Maître.

"Dès que je fus rentré, il me dit : "Ah ! que vous avez bien fait de venir." ... Puis, revenant à son art, objet des travaux, des méditations de sa vie : "Avez-vous, me dit-il, pratiqué avec suite mes derniers moyens, auxquels vous seul avez été complètement initié ? Je suis heureux, avant de mourir, de vous les avoir transmis." ... "Mais, pour ne prendre que sur les résistances, il ne faut jamais rapprocher vos poignets du corps, jamais ramener à vous. Sans quoi, vous prenez sur l'élan du cheval, même sur son poids. Alors, tout s'en va." Sa voix était faible... Mais, la mimique accompagnant ses paroles était des plus expressives. Les mouvements des mains, des bras, du corps, mieux encore que la parole, rendaient saisissantes les dernières inspirations du Maître... Alors, prenant ma main et lui donnant la position de la main de bride, il dit : "Rappelez-vous bien : toujours ça" , et il immobilisa ma main sous la pression de la sienne. "Jamais ça", et il rapprocha ma main de ma poitrine. "Je suis heureux de vous donner encore ça avant de mourir."

En le quittant, je l'embrassai et sa main serra bien affectueusement la mienne. Je ne devais plus le revoir que dans le cercueil."

Voilà la dernière leçon que François Baucher a voulu donner à son élève avant de mourir : ne jamais tirer sur les rênes... Alors, vous qui lisez ce texte, n'oubliez pas cette dernière leçon du Maître : "Toujours ça, jamais ça"...

Le général L'Hotte